jeudi 20 janvier 2011

La victoire de Lukashenka (?)

"Ouf!" semble-t-il se dire...

Malgré l'ampleur de la mobilisation contre son régime et l'émoi causé dans le monde par les images de répression, Loukachenka a bel et bien gagné ses élections. Il ne les a pas gagnées dans les urnes, comme en font foi plusieurs sondages indépendants et les résultats de bureaux où les votes ont été comptés, mais il les a gagnées tout de même. L'objectif d'un dictateur est de rester au pouvoir. C'est chose faite.

 
Le régime de Loukachenka tient sur trois piliers: un soutien externe, un certain soutien interne, et une machine répressive. Si le soutien interne s'est fortement réduit dans les dernières années et si le soutien externe a paru chancelant, les piliers sont toujours debout et il ne semble pas y avoir de changements à l'horizon pour le Bélarus. En fait, tout dépendra de la position de la Russie et de la sévérité des sanctions européennes.

Loukachenka a besoin de revenus pour maintenir son régime, tant pour s'assurer du soutien d'une partie de la population que pour payer sa machine répressive. Depuis que l'Occident se mobilise contre son régime, il paraît clair qu'emprunter de l'argent à l'ouest n'est plus une option réaliste. Heureusement pour lui, le 20 décembre 2011, le premier ministre russe Vladimir Poutine a rassuré le voisin bélarussien en promettant de continuer les livraisons de ressources naturelles à bas prix. De cette façon, le modèle économique étatique du Bélarus pourra survivre même dans l'éventualité où l'Occident lui refuse des prêts.

Même si l'UE et les États-Unis vont sans doute prendre des mesures contre le Bélarus dans les prochaines semaines, il n'est pas encore sûr si celles-ci iront au-delà du symbolique. Pour le moment, les avis sont partagés et les sanctions pourraient aller de l'annulation du championnat du monde de hockey de 2014 à un embargo sur les produits pétroliers. La dernière alternative ferait mal au régime, qui tire entre 40 et 60% de ses revenus de la revente de pétrole acheté en Russie et raffiné au Bélarus. Mais est-ce possible? La Lettonie et la Lituanie, par exemple, dépendent du Bélarus dans le domaine énergétique. Appuieront-elles des mesures sévères dans ce cas? Déjà, des voix en Europe s'élèvent pour refuser des sanctions qui toucheront la population. Peut-on cependant affaiblir le régime sans toucher à son économie et donc, sans affecter le peuple? De plus, la question se pose si Loukachenka ne trouvera pas une solution même en cas d'embargo, lui qui a plus d'une fois montrer sa capacité à se débrouiller, même isolé.

Quelles sont donc les possibilités qui s'offrent à l'Union Européenne et aux États-Unis devant le régime bélarussien? Tant que la Russie appuiera Loukachenka, il semble que rien n'arrivera. La solution viendra d'un accord entre la Russie et les Européens, ce qui ne semble pas impossible. Ainsi, la Russie a dernièrement appuyé une résolution du Conseil de l'Europe exigeant des sanctions à l'égard du Bélarus. Mais la Russie est-elle prête à lâcher complètement le président voisin? Et l'Europe est-elle prête d'enter en guerre ouverte avec le régime bélarussien? Il n'est pas dans les habitudes de l'Union Européenne d'œuvrer activement et ouvertement pour le renversement d'un régime. Déjà, des solutions plus modérées sont proposées par divers pays: visas gratuits pour les étudiants, bourses d'études, subventions pour les ONG, etc.. Les nombreux programmes élaborés pour développer la société civile et les initiatives citoyennes vont sans doute se multiplier dans les prochaines années et il semble que telle sera la voie qui sera empruntée par l'Union Européenne.

Au Bélarus, la population a compris qu'il n'y aurait pas de changements dans les hautes sphères du pouvoir. Même si nombreux ont été ceux qui ont voté pour l'opposition (peut-être même jusqu'à 40-50%, selon certains avis), les arrestations et les descentes quotidiennes montrent que le KGB veille. L'opposition a été décapitée par l'arrestation de ces meneurs et une trentaine d'entre eux font face à des peines de prison allant de 5 à 15 ans pour «l'organisation d'émeutes». Même si il est plus que probable que les vitres cassées le soir du 19 décembre fassent partie d'une provocation des forces spéciales en civil, la justice est à la botte du pouvoir et n'hésitera pas à monter un procès-spectacle si Loukachenka y tient. Déjà, les médias gouvernementaux se déchaînent pour exposer le supposé complot germano-polonais monté pour renverser le pouvoir avec l'aide de l'opposition. Cette opposition, dont le président disait il y a un mois qu'elle était financée par la Russie, est maintenant à nouveau une agente de l'Occident. Cette version ne satisfera sans doute que les crédules et les partisans du président. En attendant, pour les Bélarussiens qui rêvaient de changement, le cauchemar se poursuit et l'émigration tente plus d'un.





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